Sarain Fox sur la préservation du savoir autochtone ici et ailleurs

L’activisme, Sarain Fox est tombée dedans quand elle était petite. La conteuse anichinabée a grandi sur les rives du lac Supérieur avec une mère monoparentale qui a consacré sa vie à préserver le savoir et les récits autochtones. Aujourd’hui elle–même militante, Mme Fox coanime sur APTN la série documentaire Future History et se sert de la danse comme tremplin pour diffuser la parole autochtone. (Découvrez ici ce qu’elle glisse dans son bagage à main.) Longtemps ambassadrice de la Manitobah Mukluks Storyboot School de Toronto, qui enseigne comment fabriquer des mukluks, elle a récemment participé au lancement d’un programme interculturel à Sydney, en Australie, qui favorise l’autonomie des artistes aborigènes et offre aux voyageurs une expérience culturelle authentique.

02 décembre 2019

enRoute Quel est le moteur de votre militantisme ?

Sarain Fox J’ai grandi en voyant maman lutter pour préserver nos récits, notre histoire et notre identité. C’est difficile après de ne pas honorer cet héritage. Je veux qu’à leur tour mes enfants voient que je me bats férocement pour leur offrir un avenir meilleur. Ma mère m’a élevée de façon que je sois fière de mon identité, mais j’ai souffert d’intimidation à l’école primaire, où les écoliers étaient majoritairement blancs. Je menais une double vie. J’appartenais à mon peuple, mais je tamisais cet héritage une fois à l’école. Ça explique aujourd’hui la raison d’être de mon travail. Je ne veux plus que personne se sente obligée de cacher sa vraie nature ou ait honte de son identité.

ER Vous avez débuté votre carrière comme danseuse. Quel rôle joue la danse dans votre vie actuelle ?

SF La danse, c’est ma passion première, alors il est primordial que je monte sur scène au moins une fois par année. Depuis presque 10 ans, je collabore avec le chœur Xara Choral Theatre, d’Halifax. Cet automne, nous avons présenté en tournée une nouvelle œuvre intitulée Rings Through Water, un spectacle multimédia qui traite de la protection de l’eau, et des femmes autochtones disparues et assassinées. Ç’a été un choc culturel en tant qu’artiste amérindienne de participer à cette forme d’art colonial qu’est la chorale. Mais, ç’a également été une belle occasion d’engager le dialogue et de jeter des ponts entre nos deux univers.

Une série de trois portraits en noir et blanc de Sarain Fox

ER Parlez–nous du programme que vous avez récemment lancé en Australie.

SF Ce partenariat entre les fondations KARI et TreadRight, qui finance la Manitobah Mukluks Storyboot School, permet aux Aborigènes de Sydney de changer la façon dont on présente leur terre natale aux touristes. À titre qu’ambassadrice, j’ai la chance de réfléchir à la manière dont les voyageurs explorent de nouveaux territoires, ainsi que de favoriser la discussion sur des façons éthiques et authentiques de voyager. En fait, il s’agit de permettre aux gens de repartir avec un pan de notre vérité.

ER Quelle est votre destination voyage de prédilection ?

SF J’ai un faible pour Hawaii et l’esprit Aloha qui y règne. Je suis vraiment inspirée par les peuples autochtones qui renouent avec leurs méthodes traditionnelles de pêche et d’agriculture. Lors d’un de mes voyages, j’ai eu la chance de voir de la lave couler dans l’océan et littéralement former une nouvelle masse terrestre. J’aime aussi rentrer au bercail, à Sault–Sainte–Marie et sur les rives du lac Supérieur. C’est là que j’ai construit mon identité et que résident mes ancêtres depuis toujours. C’est là que je recharge mes batteries. C’est chez moi.

ER Que nous réserve la prochaine saison de Future History ?

SF Les deux premières saisons, nous avons exploré le savoir autochtone et braqué les projecteurs sur ceux qui le préservent. Pour la troisième saison, dont le tournage commencera au printemps, nous voulons nous attaquer à la façon d’y arriver. De quels outils concrets se sert–on pour changer le discours ? De quelle manière les Autochtones revendiquent–ils leur juste place ? Comment contribuent–ils à d’importants secteurs, comme la politique, l’art et l’éducation ?