La drag queen Katya Zamolodchikova pleure en avion, aussi

Partagez

« She’s the bright red scare with the long blonde hair, always keeps ‘em coming back for more*. »

Katya Zamolodchikova, élue Miss Congeniality dans la saison 7 de RuPaul’s Drag Race et finaliste dans la saison 2 de RuPaul’s Drag Race: All Stars, est une drag originaire de Boston mais de personnalité russe dont la popularité ne se dément pas depuis sa première apparition en 2015. Présenté l’an dernier en tournée, son solo d’humour, Katya: Help Me, I’m Dying, est présentement accessible en exclusivité aux membres d’Aéroplan sur la nouvelle plateforme de diffusion en continu d’Air Canada, gracieuseté d’OUTtv. Nous avons joint Katya afin de discuter de son nouveau livre, Trixie and Katya’s Guide to Womanhood (coécrit avec Trixie Mattel, autre drag), de sa façon de vivre ses angoisses et de la raison pour laquelle elle aime regarder des films tristes à 10 000 m d’altitude.

enRoute Qu’est-ce que vous a poussée à vous travestir ?

Katya Zamolodchikova À trois ans je portais une perruque. Je m’en faisais une avec un t-shirt et je paradais avec ça. On peut donc dire que l’idée était déjà en germe à un très jeune âge.

ER Votre nouveau livre est un guide de beauté et des arts familiaux dans le style des vieux livres d’étiquette destinés aux femmes. Quelle était votre approche au moment d’écrire avec Trixie ?

KZ Être une femme est un boulot à temps plein, alors Trixie et moi, on s’est dit : « Quelle meilleure façon pour une femme d’apprendre ce boulot qu’auprès de deux hommes gais ? » Ça dédramatise la chose. Le message sous-jacent, c’est que si vous avez vraiment du mal à trouver votre identité, alors on espère que la première chose que vous allez comprendre, c’est que tout ça, c’est juste des conneries, de toute façon. Ça nous permettait de traduire sur la page notre approche respective de l’humour et du travestisme. Le produit final s’est avéré bon, étonnamment. J’en suis très fière.

ERVous parlez sans détour de vos angoisses. Comment y faites-vous face, particulièrement avec le confinement ?

KZ Le confinement est génial pour mes angoisses : il me suffit de ne pas sortir de chez moi ! Règle générale, je suis morte de peur à l’idée d’avec des interactions sociales, de commencer un nouvel emploi, d’aller au bureau de poste, ce genre de chose. Mais l’anxiété est une roue de hamster, et le confinement vous laisse assurément le temps de vous imaginer toutes sortes d’histoires d’horreur. Heureusement que les divertissements ne manquent pas. Ces temps-ci, il doit bien y avoir quatre milliards de trucs uniquement sur Netflix. Sans parler du yoga et de la respiration. Peut-être que mon prochain bouquin devrait être un livre de yoga.

ER La nouvelle plateforme de diffusion en continu d’Air Canada propose votre émission-monologue comique Katya: Help Me, I’m Dying, qui est sortie l’an dernier. Présenter se spectacle en tournée, c’était comment ?

KZ C’était fantastique. J’ai pu faire le tour du monde et aller à des endroits où je n’étais jamais allée auparavant : Hong Kong, les Philippines, et partout aux États-Unis, au Canada et en Australie.

Katya Zamolodchikova devant un fond d'automne
    Photo : Brian McCook

ER Vous aviez de la famille dans la salle lors de la captation du spectacle à Boston, non ?

KZ Oui ! Ma tante Cathy est descendue en voiture et s’est arrangée pour se faufiler dans la salle, et je suis tellement heureuse qu’on ait ça sur vidéo. Elle est hilarante, et je vous jure que si je l’avais fait monter sur scène elle aurait illico improvisé un numéro de 30 minutes. Elle est tellement comique. C’est merveilleux d’avoir une famille qui vous soutient autant.

ER Dans le spectacle, vous donnez votre propre version d’une célèbre scène de Mulholland Drive. Pourquoi ce film vous a-t-il inspirée ?

KZ Mulholland Drive est mon expérience cinématographique préférée à vie. Je n’oublierai jamais ça : c’était en 2001, j’étais en première année en beaux-arts, et on est allés voir ça en groupe. C’était électrisant. On est allés dans un petit resto par la suite et on a parlé du film pendant deux heures, je pense. Le plus drôle, c’est qu’il y a une autre scène du film que je n’ai pas pu parodier ou recréer, par manque de budget. C’est la scène qui se déroule au Club Silencio, quand Rebekah Del Rio, la chanteuse, interprète a cappella en espagnol la chanson Crying de Roy Orbison, et c’est tellement magnifique et envoûtant, et là elle s’évanouit avant la fin et on comprend qu’elle chantait en play-back. Cette scène est au sens propre la raison même pour laquelle je me travestis.

ER Qu’est-ce que vous aimez regarder en avion ?

KZ J’aime les trucs tristes. En avion, j’ai envie de pleurer. Je pense que, parce que je fais de l’humour, j’ai de la misère à regarder des comédies. Si une scène ou une réplique est vraiment drôle, je vais hocher de la tête, ou me dire : « Ah, ça, c’était drôle », mais je ne rirai pas. Mais si je regarde quelque chose de vraiment triste, je vais juste pleurer. Et j’adore pleurer en avion, parce que ça rend les autres passagers mal à l’aise. Ce qui est très amusant.

ER Qu’est-ce qui vous fait pleurer ?

KZ L’autre jour je regardais sur YouTube des clips de Simone Biles, la gymnaste américaine. Je regarde des compilations de ses routines au sol et j’en ai des sanglots, juré, tellement elle est parfaite. C’est comme voir La Joconde ou un chef-d’œuvre artistique ; dans les sports, cette femme est un Michel-Ange des temps modernes.

ER Comment décririez-vous le cheminement de Katya, depuis votre première apparition à RuPaul’s Drag Race jusqu’à la Katya d’aujourd’hui ?

KZ Je dirais que c’est la transformation d’une jeune stagiaire nerveuse et culottée en vieille peau chevronnée et grisonnante.

* Traduction : « C’est elle votre hantise rouge vif aux longs et blonds tifs, celle dont on n’a jamais assez. » Extrait de la chanson Read U Wrote U, interprétée par Katya et les autres drags lors de la saison 2 de RuPaul’s Drag Race: All Stars.

Le questionnaire

  • Voisine de rêve Julia Roberts. Je voudrais parler avec elle de sa relation avec son mari et de ses mardis à jouer au majong avec ses amies, et savoir comment vont Finn et Hazel.
  • Premier souvenir de voyage Prendre l’avion pour le Portugal, avec mes oreilles qui se bouchent d’aplomb. Mais ça ne m’arrive plus ; c’est un jeu d’enfant.
  • Dernier voyage J’étais en vacances en Italie. J’avais donné quelques spectacles, puis le confinement a été déclaré et on a réussi à sortir de Rome quelques heures à peine avant l’arrêt total.