Dubaï : Oasis de mieux-être
Forfaits de bien-être, initiatives populaires de mise en forme et ingrédients de production durable transforment la métropole du désert qu’est Dubaï en une oasis de mieux-être.
Il neige à Dubaï, du moins dans la chic zone de parcours marbrée de l’Awaken Spa, au nouvel hôtel Atlantis The Royal. Mon trouble transparaît sur mon visage.
« Dans cette ville, tout est possible », souligne une préposée en me faisant un clin d’œil. De la neige, j’en ai suffisamment à Montréal. Heureusement, il y a d’autres options ici. À deux pas, on trouve une lumineuse grotte d’halothérapie, une piscine d’hydrothérapie géante, un hammam d’aromathérapie et une aile indépendante de caissons sensoriels high-tech pour chromothérapie. Les visiteurs s’y laissent enve- lopper par des lumières de couleurs alternées et par les battements binauraux sortant des haut-parleurs, qui visent à promouvoir relaxation totale, repos et meilleure humeur. Plus loin, la clinique Aeon offre des soins avancés tels traitements du visage par cryothérapie et injections de cellules souches.
Un hammam et plusieurs soins corporels aux ingrédients locaux, tels que dattes et sable du désert, cet exfoliant de la nature, sont aussi offerts aux férus de spa traditionnels. L’Awaken Spa de l’Atlantis, The Palm voisin propose sans frais des méditations hebdomadaires de sonothérapie, et le massage vedette débute par un rituel d’inspiration ayurvédique.
« Non seulement je me sens ancrée, mais je marche sur un nuage. »
« Pigez une pierre », m’enjoint ma thérapeute, Celine, en guidant ma main dans un petit sac noir. « Ce que vous prendrez orientera notre approche de votre soin. » Terre, feu, eau, air : c’est d’adon, je pige une « terre », signe que j’ai besoin d’ancrage. Celine sourit d’un air entendu : je viens juste de mentionner mon vol long-courrier. Une heure plus tard, grâce à ses mains magiques et à l’huile de massage ayurvédique qui sent bon la terre, à base d’huiles essentielles de genièvre, de vétiver et de sauge sclarée, non seulement je me sens ancrée, mais je marche sur un nuage.
Glossaire du bien-être
- Ayurvéda — Approche holistique du mieux-être basée sur la médecine traditionnelle indienne. Le mot sanskrit signifie « connaissance de la vie ».
- Battements binauraux — Illusions auditives nées de l’écoute simultanée de deux sons de fréquences différentes ; censés réduire l’anxiété et améliorer la concentration.
- Chromothérapie — Usage de différentes couleurs ou de lumières colorées afin de favoriser une meilleure humeur et santé, de la peau et globale.
- Cryothérapie — Exposition à des températures très basses à des fins thérapeutiques, telles que récupération musculaire et amélioration de l’humeur.
- Halothérapie — Respiration d’air salin qui pourrait avoir des bénéfices pour l’appareil respiratoire.
- Thérapie sonore — Usage de divers sons musicaux ou instruments, tels que bols chantants et diapasons, pour favoriser un mieux-être émotionnel et physique.
Le mieux-être est au cœur de la vision de demain que propose le nouveau Musée du futur, merveille architecturale de forme torique et d’une blancheur éclatante signée Killa Design et inaugurée en février 2022. On me guide à l’étage Al Waha, entièrement occupé par une expo permanente consacrée au bien-être, dont chaque installation invite le visiteur à se débrancher du monde numérique et à se brancher sur ses sens.
Je me tiens devant un gong et me sens vibrer au plus profond de mon être, puis je passe à une table où quelques autres visiteurs et moi nous entraînons à fredonner à l’unisson. Le dernier arrêt à l’étage Al Waha est une vaste salle circulaire où l’on s’étend sur des tapis pour une séance de contemplation de groupe agréablement relax.
Sitôt à l’horizontale, je veux d’instinct vérifier mes courriels, mais je laisse mon téléphone dans mon sac en m’imaginant que je n’en possède pas. Je suis plutôt du regard les vagues lumineuses projetées au plafond et, l’espace d’une seconde, l’avenir est non techno.
Au BOCA, où je prends mon souper, le mieux-être passe par un effort conscient pour réduire le gaspillage, prendre soin de l’environnement et soutenir les petits fournisseurs et le personnel. Récompensé en 2023 par une Étoile Verte Michelin pour sa gastronomie durable, le BOCA intègre à ses menus son rapport annuel d’émissions de carbone sous forme d’infographie, avec code QR menant les clients curieux à son manifeste pour le développement durable.
Le bien-être de la collectivité est un autre pilier important. « Nous offrons des salaires concurrentiels et des prestations de maladie, et nos employés res-tent longtemps », affirme Omar Shihab, fondateur et directeur du développement durable du BOCA. Les clients aussi tendent à être loyaux : l’établissement du quartier des affaires est animé même en ce mardi, les dîneurs tirés à quatre épingles partageant des plats tels que ceviche de thazard rayé du golfe et artichauts confits et poêlés.
« Dubaï a plein de restos de chefs vedettes, qui sont fabuleux, mais ces chefs ne font pas les marchés locaux de produits de la ferme et de la mer au point du jour, assure M. Shihab. Notre réseau de fournisseurs nous permet de créer un menu axé sur les ingrédients de saison. On se demande constamment : “Quels produits locaux peut-on utiliser ?” »
Les employés en cuisine et au bar collaborent pour éviter le gaspillage en utilisant autant de parties des ingrédients que possible, allant jusqu’à en recycler près de leur date de péremption. Les restes de tomates donnent la garniture comestible du cordial fraises- tomate. « C’est comme des Roulés aux fruits pour adultes », précise M. Shihab. Les peaux de tomates sont réduites en poudre qui assaisonne le « pain de la veille » servi en entrée, garni de ricotta à base de lait quasi périmé et d’avocat bien mûr. Ce plat croquant, crémeux et riche en umami est joliment garni de boutons de fleurs comestibles. Après quelques bouchées, j’en suis sûre : les restes n’ont jamais eu si bon goût.
M. Shihab a même déniché un petit fournisseur d’huîtres sur la côte est d’Oman. L’approvisionnement local n’est pas facile, admet-il, mais le projet jouit d’appuis et d’investissements conséquents. C’est aussi la raison d’être de l’International Center for Biosaline Agriculture (ICBA), organisation dubaïote qui vise à trouver des ingrédients et superaliments pouvant pousser dans le sol aride du désert. « Déjà, l’ICBA a développé des variétés très nutritives d’amarante et de quinoa qui se cultivent ici », conclut M. Shihab.
Certaines initiatives donnent forme aux menus, d’autres, à d’entières communautés. Le Dubai Fitness Challenge, qui a lieu chaque année de la fin octobre à la fin novembre, vise à amener chaque résident à faire 30 minutes d’exercice par jour durant ce défi d’un mois, dans le but de créer l’habitude d’une vie active.
« On n’associe pas spontanément forme physique et Dubaï », convient Yaqoub Nabi, directeur du Dubai Fitness Challenge, en s’épongeant le front au sortir d’un court de tennis à Kite Beach. Le soleil est couché, mais le village brille d’activités, entre combats de boxe, yoga sur la plage et cardiovélo. Les installations et les cours sont gratuits pendant les 30 jours du défi, et l’on trouve 26 pôles comme celui-ci, de tailles diverses et commandités par leur quartier, dans toute la ville.
« On avait de gros doutes à propos de la Dubai Run annuelle. Sérieux, on ne pensait pas que les gens de Dubaï se lèveraient si tôt pour courir, déclare M. Nabi. Mais on se trompait royalement. La course débute à 5 h, et certains se pointent dès 3 h pour partir les premiers. Beaucoup de coureurs viennent par avion ; l’an dernier, on a eu plus de 226 000 participants. »
Pour ceux qui préfèrent le vélo, il y a également le Dubai Ride. Ce sport gagne en popularité en ville, et une ébauche de plan est déjà à l’étude pour The Loop, une piste cyclable climatisée de 93 km ceinte de verdure et conçue pour que les cyclistes restent au frais dans la chaleur du désert.
Le Dubai Fitness Challenge a également inspiré un tas de studios de remise en forme. « De plus en plus de gyms ouvrent, souligne M. Nabi. En ville, on remarque un intérêt marqué pour le CrossFit, la planche à pagaie et le yoga. Il y a de tout pour tous. »
À Hatta, à environ une heure et demie du centre-ville de Dubaï, le paysage de désert aride laisse place à un grand barrage entouré des monts Hajar. Les visiteurs peuvent y louer des pédalos et des kayaks pour profiter d’une dose supplémentaire d’endorphines naturelles qui les change momentanément des gratte-ciel à perte de vue.
Ce n’est pas tout à fait le lac Louise, mais les eaux bleues du réservoir et les montagnes rocheuses environnantes dégagent une aura mystique comparable. Je n’aurais pas pensé faire du kayak parmi les canards et sous le regard de quelques sympathiques chèvres de montagne lors d’un séjour dans le désert. Mais comme je l’ai compris, presque tout est possible à Dubaï.