Sur l’avenue Montaigne, en prenant un virage serré, à la sortie des Champs–Élysées, l’Hôtel Plaza Athénée arbore fièrement le rouge, sans piquer un fard. Avec ses auvents fardés de rouge, la grande dame haussmannienne détourne les regards de sa coterie de voisins haute couture, dont les maisons phares Céline, Prada et Louis Vuitton.

Une histoire d’amour se cache derrière la couleur rouge. Dans les années 1940, les acteurs et amants maudits Marlene Dietrich et Jean Gabin étaient des habitués des salles en marbre de l’hôtel, se côtoyant si souvent dans la brasserie du rez–de–chaussée que la table 1 à côté du bar leur était réservée. Des décennies plus tard, lorsque M^me Dietrich s’est installée de l’autre côté de la rue, M. Gabin a demandé au concierge de garnir le balcon de la chambre qu’ils avaient partagée de centaines de roses. Ce geste romantique est à l’origine des balcons rouges de l’hôtel qui débordent de 1900 géraniums écarlates chaque année. (Lesquelles vivaces durent plus longtemps que les roses.)

Même aujourd’hui, alors que les influenceurs font la moue pour prendre des égoportraits devant la façade taillée dans la pierre, il est difficile d’exagérer la grandeur d’un lieu qui a reçu la distinction officielle de palais en 2011, à 2 ans de son centenaire. Après avoir franchi la porte tournante, le hall d’entrée est tout aussi majestueux, entouré de colonnes ornées de bouquets semblables à des corsages, tandis que sous les pas, les sols en mosaïque résonnent au son des talons hauts ou brillent sous les reflets du lustre en cristal. Et, oui, c’est bien du parfum Dior sur mesure que vous sentez venant des fleurs : une fragrance unique, ambrée, créée exclusivement pour le Plaza. 

Aucun monarque n’a jamais élu domicile dans cette propriété palatiale de 54 suites et 154 chambres, à l’exception de la reine du grand écran Elizabeth Taylor, qui s’est un jour installée dans la suite royale durant un extravagant six mois. L’hôtel s’inscrit plutôt dans la lignée de la royauté de la mode en remontant jusqu’à Christian Dior qui, en 1946, a délibérément ouvert son premier atelier à la vue de la clientèle aisée du Plaza. L’année suivante, il a dévoilé l’élégant costume noir et ivoire cintré, le bien nommé Bar Suit, conçu pour le personnel du bar de l’hôtel.

Ici, à l’instar d’une collection couture, il n’y a pas deux pièces pareilles, chacune étant aménagée par Marie–José Pommereau dans le style d’un appartement parisien classique, avec des meubles anciens pour accentuer les hauts plafonds. Au 7^e étage, redessiné par Bruno Moinard et Claire Bétaille en 2021, et au 8^e étage, les chambres sont style art déco avec une palette neutre, des finitions en acier et des touches de rouge. Les plus en demande ? Les suites Eiffel, avec vue imprenable sur la Dame de fer, et parfois la 609, la suite Prestige rose présentée dans l’avant–dernier épisode de Sexe à New York.

Aussi luxueuses que soient les chambres, ce sont les petites attentions pratiques qui impressionnent, comme les adaptateurs branchés sur les prises de la table de nuit ou le choix entre oreillers de blé et oreillers ostéopathiques (entre autres). Dans le spa Dior, fraîchement rénové l’automne passé, les dernières traces du décalage horaire se dissipent dans la Light Suite, où des cures de sommeil énergisantes, relaxantes ou réparatrices sont dispensées sous un ciel parsemé de lampes DEL qui imitent la lumière du soleil. Pour un coup d’éclat supplémentaire, les traitements du visage ou du corps Soin Dior Privé sur demande, exclusif au spa, combinent l’électrostimulation et la cryothérapie. Véritables petits–remontants personnalisés.

Vivre comme et avec des rois vaut son pesant d’or et vous fera dépenser quelques bidous. Si vous n’avez qu’une nuit, réservez une table au Relais Plaza, où arts plastiques et arts culinaires se conjuguent au plus que parfait. Choisissez votre place judicieusement : À l’époque bénie de la brasserie, Dior se frayait un chemin dans la mêlée depuis la table 2. Plus tard, on pouvait apercevoir John Travolta se la jouer cool à la 34, à portée de voix de Grace Kelly et Jackie Kennedy, installées respectivement à la 28 et à la 19.

De nos jours, le restaurant sous la houlette du chef Jean Imbert au Plaza Athénée a beau attirer les stars, dont une étoile Michelin, décernée neuf semaines seulement après l’ouverture en 2022, il n’en reste pas moins que rien ne vaut l’atmosphère d’une bonne vieille brasserie dorée. Et quand il s’agit de dorure, Le Relais Plaza se vautre dans son lustre, qu’il s’agisse de la touche en or du chef Imbert (qui se voit jusque sur la carte), de la fresque de 20 000 feuilles d’or de Francine Saqui représentant une Diane Chasseresse ou des dîneurs aisés qui valent leur pesant d’or.