La livrée de l’avion qui vous transporte influe–t–elle sur votre humeur ?

Le ciel est essentiellement bleu… et rouge. Pas parce que la lumière bleue voyage mieux que le reste du spectre. Ni parce que le soleil vire au rouge le soir, au bonheur des marins. Le bleu et le rouge sont aussi les pigments privilégiés des transporteurs aériens et de l’industrie du voyage. Imaginez un voyageur : en général, il tendra un passeport bordeaux ou marine puis montera dans un avion peint en bleu ou en rouge, à destination d’un pays au drapeau rouge ou bleu (seuls 10 drapeaux nationaux se passent de ces couleurs). Pourquoi l’aviation zèbre–t–elle le ciel de rouge et de bleu ? Une récente étude fournit quelques pistes.

Publié l’an dernier dans l’Asia Pacific Journal of Tourism Research, ce rapport s’attarde aux préférences des passagers en matière de livrée d’avions. Les participants ont d’abord été scindés en deux groupes : les voyageurs d’affaires et les vacanciers. Chacun devait classer 34 empennages d’avion en fonction de la raison de son voyage. Les gens d’affaires ont opté pour les bleus et rouges primaires et les lignes nettes ; les villégiateurs, pour les dérives multicolores aux jets de jaune, de rose, de vert, d’orange et de turquoise, et pour les formes courbes.

28 août 2019
Une illustration du sommet de l’aile d’Air Canada parmi les nombreuses couleurs des autres avions

Par la suite, quatre des livrées les plus appréciées par chacun des groupes, et quatre neutres, ont été soumises à un troisième échantillon. Sans précision sur la raison du voyage, les participants devaient alors apparier au mieux des descriptions de transporteurs fictifs avec les logos présentés. Les dérives prisées des businessmans ont eu la faveur de ce troisième groupe s’il était question de ponctualité, d’efficacité et d’élégance ; celles choisies par les touristes ressortaient quand on évoquait la convivialité, le plaisir et l’exotisme.

Les auteurs du rapport admettent qu’un graphisme attrayant compte moins que le prix, les horaires et le service, mais soutiennent que l’esthétique des empennages peut susciter une émotion durable. « La couleur a une influence palpable sur l’humeur », convient Paul Wylde, spécialiste du design et de l’image de marque qui a travaillé avec Air Canada. En cabine, la recherche a démontré qu’un éclairage de couleur peut même avoir une incidence physique, au point d’amoindrir les effets du décalage horaire. Une étude de 2014 du centre aérospatial allemand indique qu’un éclairage jaune transmet une sensation de chaleur et favorise le sommeil, alors qu’un éclairage bleu garde le voyageur alerte et lui donne le sentiment d’une qualité de l’air accrue. Comme quoi la froideur du bleu et la chaleur du jaune sont davantage que des perceptions.

 


 

Études en rouge

 

Quelques effets psychologiques de l’érubescence.

  1. Maillot rouge Selon des anthropologues de l’université de Durham, en Angleterre, les sportifs de combat vêtus de rouge ont remporté 5 % plus d’épreuves aux Jeux olympiques de 2004 que ceux en bleu. Une autre étude portant sur les matchs de foot anglais depuis la Seconde Guerre mondiale démontre que les équipes en rouge ont davantage de chance d’être championnes.

  2. Notifications rouges C’est connu, Facebook a adopté le bleu parce que son fondateur, Mark Zuckerberg, est daltonien. Mais les notifications que les adeptes de ce réseau social reçoivent sont rouges. Elles étaient bleues à l’origine, mais nul ne s’en servait jusqu’à ce qu’elles virent au rouge. Selon Tristan Harris, cofondateur du Center for Humane Technology, c’est parce que le rouge est un « déclencheur ».

  3. Miser sur le rouge Une étude de 2012 publiée dans le Journal of Experimental Social Psychology a révélé que, même si la couleur n’ajoute pas de valeur, les jetons de poker rouges « rendent les joueurs plus intimidants ». Ceux ayant des jetons rouges étaient plus portés à augmenter la mise, et leurs adversaires avaient plus de chances de retirer la leur.