Si ça roule pour Air Canada, c’est grâce aux pneus d’avion

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Ces gros pneus rainurés gonflés à l’azote sont les héros méconnus des vols d’avion.

Laisser des traces de pneus a peut–être encore la cote chez les amateurs de voitures de course. Nous, pilotes, tentons de limiter autant que possible la dégradation du caoutchouc, même si un petit nuage de fumée bleue est inévitable à l’atterrissage.

Les passagers ne les voient pas, mais les pneus d’avion sont une grosse affaire : chacun des 12 pneus du train principal d’un Boeing 777 (le plus gros appareil d’Air Canada) fait plus de 1,3 m de diamètre et pèse 120 kg. Chaque pneu du parc aérien a son histoire, consignée individuellement et suivie de près par la Maintenance. En moyenne, un pneu de roue principale fait de 300 à 450 atterrissages ; un pneu de roue avant, de 200 à 350. (La roue avant s’use davantage au fil des manœuvres au sol.) Selon le niveau d’usure, certains pneus effectueront jusqu’à 600 atterrissages ; d’autres seront remplacés après 50.

Les pneus de notre parc aérien sont loués à Goodyear, à Michelin et à Bridgestone, qui en font un suivi minutieux par numéro de série. Chaque appareil a ses balises en matière d’entretien des pneus : les fournisseurs tiennent compte de l’âge, du nombre de rechapages et d’atterrissages et du degré d’usure pour décider quels pneus rechaper ou remplacer.

À la différence des pneus d’auto, ceux des avions ont plusieurs longues rainures qui permettent de rouler à des vitesses élevées et qui aident à canaliser et à évacuer l’eau vers l’arrière. (Non, il n’existe pas de pneus à neige pour avion.) Puisque chaque pneu laisse systématiquement sa marque à l’atterrissage, on peut apercevoir par le hublot une concentration de traces noires aux extrémités des pistes ; l’entretien de piste vise entre autres à retirer ces restes de caoutchouc.

15 janvier 2021
Une femme inspectant les pneus d'un avion d'Air Canada
   Photo : BrIan Losito

Super azote

  • Les pneus d’avion sont gonflés à l’azote plutôt qu’à l’air, qui contient de la vapeur d’eau qui gèle à –57 °C, la température aux altitudes de croisière. L’azote ne se liquéfie qu’à –173 °C et ne contient pratiquement aucune humidité.

  • Les pneus sont soumis à une force extrême à l’atterrissage et peuvent chauffer rapidement ; or, l’azote n’est pas combustible.

  • L’azote étant un gaz inerte, il prolonge la durée de vie des pneus : à la différence de l’oxygène, il ne corrode pas le métal des roues et ne réagit pas avec le caoutchouc.

 

En chiffre

  • 230 — Pression optimale de la majorité des pneus du Boeing 787, en livres par pouce carré, soit 15,9 bars. Elle est d’environ 2 bars pour une auto.

 

Glossaire d’aviation

  • Pneus carrés — Les pneus d’un appareil longuement immobilisé au froid mettent parfois du temps à s’assouplir, d’où un roulage plus cahoteux.

  • Kick the tires — Terme utilisé par les pilotes comme synonyme d’inspection extérieure.

  • Eau d’Aviation — Ceux qui guettent les atterrissages d’avions près des pistes reçoivent des émanations de caoutchouc. Mêlé aux gaz d’échappement, ce « parfum » distinct est un des plaisirs de l’observation d’aéronefs.

Demandez au commandant

Envoyez–moi vos questions sur l’aviation et les opérations aériennes : douglas.morris@aircanada.ca

Portrait du capitaine Doug Morris d'Air Canada
Photo : Reynard Li

Doug Morris est auteur, météorologue, instructeur et commandant de Boeing 787 d’Air Canada.