Gurdeep Pandher fascine les réseaux sociaux et brise des barrières

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En levant haut les pieds et à force de grands gestes des bras et d’exubérance communicative, Gurdeep Pandher chasse le cafard de la pandémie et encourage la diversité culturelle et l’inclusion au moyen d’une danse folklorique du Pendjab. En 2006, ce poète, auteur, artiste et, plus récemment, danseur de bhangra devenu célèbre sur Twitter est déménagé au Canada, qu’il a sillonné de long en large avant de s’établir au Yukon. Quand la covid–19 est arrivée, il a fait migrer en ligne ses populaires cours de danse pour à la fois remonter le moral des gens et recueillir des fonds pour des hôpitaux et des banques alimentaires. Ses publications sur Twitter (dont une où on le voit danser avec des membres des Forces armées canadiennes, et que le premier ministre Trudeau a partagée) ont tendance à devenir virales : difficile de ne pas voir le monde sous un jour meilleur quand on le regarde s’arrêter soudainement de pédaler sur un chemin de terre pour se mettre à danser le bhangra dans un champ de fleurs sauvages. Nous l’avons joint dans sa cabane dans les bois près de Whitehorse pour jaser de la beauté de voyager au Canada, de la fois où il est resté bloqué dans la neige et des responsabilités qui viennent avec le statut de star des médias sociaux.

30 juin 2020

enRoute Vous avez grandi dans le village reculé de Siahar, dans l’État indien du Pendjab, avant de vous inscrire à l’université de Ludhiana, dans le même État. Quel est votre souvenir préféré, quand vous repensez à votre enfance à Siahar ?

Gurdeep Pandher J’ai grandi en l’absence de toute technologie : c’était tout à fait un mode de vie agricole traditionnel. On n’avait même pas d’horloge. On se réveillait au lever du soleil et la terre nous nourrissait, irriguée de l’eau coulant de l’Himalaya. Je me revois courant avec les autres enfants dans le village, sans aucun souci : c’est un très beau souvenir.

ER En 2006, vous êtes arrivé au Canada puis avez sillonné le pays de long en large avant d’obtenir votre citoyenneté en 2011. Qu’est–ce qui vous plaît le plus quand vous voyagez au Canada ?

GP Deux choses : la première, ce sont les paysages et l’élégance naturelle du Canada, qui sont incroyables. Quand on survole le pays en avion et qu’on regarde par le hublot, peu importe où, on ne peut s’empêcher de penser : « Mon dieu, que c’est beau ! » L’autre chose que j’aime, c’est qu’il y a tellement de cultures, de sous–cultures et de microcultures représentées au Canada, et chacune a sa propre beauté.

ER Vous avez mentionné préférer les petites localités. Pourquoi est–ce le cas ?

GP Quand je suis devenu citoyen canadien, mon désir d’apprendre à connaître le pays est devenu encore plus grand. Pour moi, avoir sa citoyenneté, ça ne se limite pas à l’obtention de documents du gouvernement ; ça implique d’explorer et d’apprendre à connaître les gens et leur culture et la façon dont ils vivent. Je suis attiré par les cultures, les arts et les gens du cru. J’aime prendre la route et m’arrêter dans des petites localités qu’autrement on n’aurait pas la chance de voir : dans ces communautés, les gens se soucient plus les uns des autres, ils ont plus de compassion.

La sensation des médias sociaux Gurdeep Pandher dansant au Yukon.
La sensation des médias sociaux Gurdeep Pandher dansant au Yukon dans une chemise bleue et un pantalon blanc.
   Photo : Mark Kelly
    Photo : Christian Kuntz

ER Vous vous êtes établi au Yukon il y a huit ans, et à présent, quand on vous demande votre saison préférée, vous répondez sans hésiter « l’hiver ». Comment en êtes–vous venu à aimer les hivers canadiens ?

GP Je faisais la route entre Vancouver et Squamish, où je vivais à l’époque, quand il s’est mis à neiger ; je n’avais aucune expérience de la neige. La route était très vallonnée et sinueuse, tel un serpent, et la voiture patinait. J’étais totalement dépassé. Je me suis dit : « Non, je ne peux plus continuer. » Je me suis arrêté au beau milieu de la route, en haut d’une immense côte. Il y avait une longue file de voitures derrière moi, mais par chance personne ne s’est mis en colère. Des agents de la GRC sont arrivés, ils m’ont dit : « On va vous aider », et ils ont mis leur véhicule devant ma voiture pour m’aider à descendre la côte. Le plus génial, c’est que tout le monde était hyper compréhensif. À présent, j’adore la neige. J’ai appris à skier, et c’est l’activité hivernale que je préfère ; je suis reconnaissant envers ceux qui m’ont appris la technique, car j’en ai retiré beaucoup de bonheur et d’amour pour l’hiver.

ER Quel endroit est incontournable à visiter au Yukon ?

GP Le parc territorial Tombstone est ma destination préférée. Les monts Ogilvie, de même que l’entièreté de la Dempster Highway, qui n’est pas asphaltée mais qui est la seule voie d’accès au parc, dégagent une beauté et une énergie incroyables.

ER Plus tôt cette année, afin de remonter le moral des gens, vous vous êtes mis à publier des vidéos de vous en train de danser en pleine nature. Comment vous êtes–vous senti quand vos publications se sont mises à devenir virales ?

GP J’ai commencé à faire ces vidéos pour répandre du positif et de la joie, et quand elles se sont mises à atteindre un si grand nombre de gens au Canada et au–delà, j’en ai été touché au plus profond de moi. Il m’arrive d’avoir des millions de vues par mois. Le bhangra est la danse du bonheur, c’est donc une danse qui peut aider bien des gens. Peu importe mon humeur, j’ai l’impression que mon corps génère la plus heureuse des énergies dès l’instant où je frappe le sol de mes pieds.

ER En quoi le bhangra contribue–t–il à briser des barrières ?

GP La danse et la musique sont des langages universels. Elles peuvent ouvrir les esprits et rapprocher des gens de diverses cultures. La danse a le pouvoir de transmettre un message d’unité et d’harmonie. Le meilleur, c’est que des gens de toutes sortes de convictions religieuses ont dit apprécier ce que je fais ; j’ai l’impression de répandre « l’unité dans la diversité » en prônant des relations interculturelles positives et une nouvelle réalisation qu’il faut s’ouvrir aux autres cultures. Je pense que ce que je fais montre le beau côté du multiculturalisme canadien.

ER Vous avez–vous–même été victime de discrimination raciale dans le passé, est–ce la raison pour laquelle faire la promotion de l’inclusivité est si important à vos yeux ?

GP Oui, même si j’ai subi de la discrimination, c’est la bonté de la majorité des gens qui me fait tenir le coup. Il y a de bonnes personnes dans chaque communauté, des gens qui s’opposent aux messages de haine. Malheureusement, le racisme existe, c’est le résultat d’un manque d’éducation, de conscience de ce que les autres cultures ont de bon. Vaincre le racisme est la responsabilité de tout le monde.

Un paysage au Yukon avec Gurdeep Pandher qui le traverse.
   Photo : Mark Kelly

ER Où, parmi les destinations canadiennes que vous rêvez de voir, irez–vous d’abord ?

GP Je me suis fait un ami au Yukon, presqu’un frère, qui est originaire de Nouvelle–Écosse. Il m’a donné le goût d’aller là–bas à la rencontre des habitants, et c’est là où j’ai l’intention d’aller l’an prochain.

ER Quel conseil de voyage donneriez–vous aux Canadiens lorsque vient le temps d’explorer plus près de chez eux ?

GP Allez voir les lacs et les montagnes, oui, mais faites connaissance avec les gens de la place, aussi. Faire leur rencontre et apprendre à les connaître vous aidera à vous faire une idée plus globale et contribuera à vous rapprocher de vos compatriotes.