« T’en veux ? » me demande Dula, qui m’assure qu’une petite dose ne me gèlera pas. Je décline poliment, voulant m’éviter un bad trip en pleine brousse tanzanienne. Et puis, n’a–t–on pas déjà assez abusé des abeilles ?
L’apiculteur de cinquième génération sort de sa sacoche un sac de plastique rempli de champignons en forme de muffin et à la couleur de bouse de vache séchée, des vesses–de–loup, dont les Massaïs de Tanzanie et du Kenya se servent depuis des siècles pour dompter les abeilles ; leurs spores délogent les insectes de leurs ruches et les abrutissent. (Les Anichinabés du sud du Québec utilisent la même technique.) Car la piqûre pour l’apiculture, mieux vaut l’avoir au sens figuré.
Voilà pourquoi il n’y a que moi qui enfile (à tout hasard, vous savez ?) une combinaison protectrice derrière la maison de Dula, à Tengeru, à environ 35 km d’Arusha, dans le nord de la Tanzanie. Dula, sans la moindre protection, prend une vesse–de–loup, le nuage de spores lui faisant secouer la tête avec vigueur. Je le suis dans un champ par–delà un enchevêtrement de cactus. Des ruches fixes sont suspendues aux acacias.