Une chasse au trésor de l’art de rue d’Invader
Au départ de Paris.
Au sommet de la tour Eiffel, les appareils photo cliquettent sans arrêt, mais le paysage urbain n’est pas seul à valoir un cliché. L’œil aiguisé repérera peut-être un petit extraterrestre bleu posé l’an dernier sur le monument : il s’agit d’une des 1437 œuvres d’Invader qui amènent les amateurs armés d’un téléphone à explorer Paris pour accroître leur collection d’art numérique.
Depuis plus de 20 ans, l’artiste parisien Invader orne murs et structures de ses emblématiques mosaïques en céramique, qui rappellent le look pixelisé du jeu d’arcade japonais Space Invaders. En 2014, il lançait l’appli gratuite FlashInvaders… et par la même occasion, une chasse au trésor moderne. Ses mosaïques d’allure rétro (3861 et plus) sont apparues dans 79 villes dans le monde ; il y en a même une en orbite sur la Station spatiale internationale, comme il se doit.
Les œuvres sont soigneusement cataloguées sur le site space-invaders.com, mais leur emplacement exact est tenu secret. Les repérer est devenu une sorte de compétition des gens du coin et des voyageurs ; chaque mosaïque qu’on « flashe » (qu’on photographie avec l’appli) vaut entre 10 et 100 points. Le meilleur score actuel, plus de 81 000 points, est celui d’un utilisateur qui a repéré plus de 2700 Invaders.
« Je considère FlashInvaders comme le premier Pokémon Go, mais on ne regarde pas un écran, on explore une ville dans tous ses recoins », explique Anne Ditmeyer, la consultante créative et blogueuse établie à Paris de Prêt à Voyager, qui a repéré plus de 530 Invaders. Elle a marché pendant des heures pour un flash, et est même allée à Versailles pour une journée de chasse aux Invaders, loin des attractions touristiques typiques. « Sans toute cette exploration, je serais passée à côté de tant de lieux magnifiques », dit-elle.
Si Paris compte toujours le plus grand nombre d’installations d’Invader, la dernière invasion touche une île entière, après l’apparition l’an dernier de 58 mosaïques à Djerba, en Tunisie. Nonobstant le côté captivant du jeu et l’appréciation de l’art urbain, c’est la découverte d’une destination avec les yeux grands ouverts qui est la véritable récompense, selon Mme Ditmeyer : « Même quand je ne trouve aucun Invader à photographier, je remarque immanquablement un nouveau détail. »
3 lieux tripants « envahis »
- Parc marin de Cancún, Mexique —
Au fond des mers, trois mosaïques d’Invader sont posées sur des sculptures sous-marines de Jason deCaires Taylor, résultat d’une collaboration des deux artistes en 2009. - Thimphou, Bhoutan —
Une céramique installée en 2018 (retirée depuis) dans le gompa de Cheri a suscité la controverse, bien qu’Invader soutienne
qu’il avait la bénédiction des moines. - Dans l’espace —
Mission (impossible ?) pour les collectionneurs d’Invaders : saisir la mosaïque Space2, qui orbite autour de la Terre sur le module Columbus de la Station spatiale internationale.