Quand nous quittons la route panaméricaine qui suit la côte du Pérou, la verte plaine irriguée fait place à d’arides collines ocre. Nous nous arrêtons devant un bâtiment de blocs de béton dans un poussiéreux village aux édifices de plain–pied, et un homme fortement hâlé en chemise de camouflage décolorée s’approche de notre camionnette en boitant. Notre chauffeur baisse la vitre du passager et la cabine s’emplit d’une odeur de cigarette et de sueur rance (il fait 37 °C). Le nouveau venu me serre la main et se présente : Mario Urbina Schmitt, paléontologue.
Nous ignorions qui nous guiderait au gisement de fossiles marins qu’Alex, notre fils de 16 ans, a décrit comme le plus riche au monde. Passionné de nature et paléontologue amateur depuis ses deux ans (il pouvait prononcer Xenotarsosaurus avant bien des mots d’usage courant), en plus de gérer le compte Instagram de Paleontology Aficionado (qui a 30 000 abonnés), Alex a fait pression pour que nous passions la relâche dans le sud du Pérou, soulignant que le site fossilifère du désert d’Ocucaje et la faune de la réserve nationale de Paracas voisine devraient être la priorité de notre famille de deux adultes et deux adolescents.
Si la réserve de Paracas, « les Galápagos du pauvre », est bien connue au Pérou et à l’étranger, le site fossilifère d’Ocucaje ne l’est pas. Au Canada, j’ai googlé trois voyagistes qui y offraient des excursions. L’un ne le faisait que dans le cadre d’un très coûteux forfait de trois semaines. Les deux autres n’ont jamais répondu, sauf qu’un avait un bureau dans une auberge de Huacachina, étrange village oasis sur notre chemin, qui nous a mis en contact avec M. Urbina Schmitt.