L’île de Beauté peut se targuer d’être une terre promise pour cyclistes. Avec quelque 1000 km de côtes escarpées, de sommets culminant à plus de 2000 m et de plages qui comptent parmi les plus belles de France, la Corse est à sillonner seul ou en peloton. Conjuguant performance et récupération à la méditerranéenne, DuVine Cycling & Adventure Company propose un circuit sur deux roues de six jours élaboré entre mer et montagnes. Étirée sur une distance de 270 km et 5575 m de dénivelé, cette escapade sportive comporte un volet gourmand qui saura récompenser l’effort. Une journée, l’excursion s’amorce en douceur à Bastia, en Haute–Corse, et se poursuit par une mise en jambes de 35 km au cap Corse. Une autre, on pédale dans la campagne endormie (traversées fréquentes de chèvres) pour rejoindre les tortueuses routes en lacets qui longent le littoral jusqu’à Pigna, où l’on peut arpenter les étals des marchés publics du village et déguster brocciu crémeux et charcuteries locales. Après une virée de plus de 30 km, la journée se termine avec des spécialités corses, une liqueur de myrte et, en prime, une vue sur le golfe de Calvi… douce récompense. —Émilie Souedet
Où voyager en 2020 —
D’un safari urbain dans New York à une halte en prêt–à–camper sur les berges d’un aquarium nature au Mexique.
Une virée à vélo
en Corse
Circuits à vélo tous niveaux en France.
Pour débutants Empruntez les routes du Parc naturel régional du Luberon et de la vallée du Coulon qui traversent les champs de lavande parfumés de la Provence.
Pour intermédiaires Depuis Valence, la porte du Midi, pédalez direction sud vers la Provence pour plonger dans la vallée du Rhône et terminer votre séjour à Avignon.
Pour pros Émerveillez–vous des vallées verdoyantes, des paysages lunaires et des sommets enneigés en gravissant le plus haut col routier d’Europe qui culmine à 2802 m d’altitude, à la cime de la Bonette.
Un séjour sidéran
en Bolivie
Un paysage blanc infini aux motifs hexagonaux de sel qui s’étend le long des sommets des Andes suffirait à attirer tout amateur de photo. Ajoutez des flamants roses, des lacs d’eau minérale turquoise, des troupeaux de lamas paissant, des geysers bouillonnants et un ciel nocturne scintillant puis couronnez le tout de dômes géodésiques de luxe, et vous obtenez le terrain de jeu suprême du photographe.
Au Kachi Lodge, premier hébergement permanent sur le plus grand désert salé du monde, qui fait plus de 10 000 km2 et se trouve à plus de 3000 m d’altitude, l’expérience en est une hautement visuelle. Au–delà de la vue panoramique des fenêtres des six dômes (désert de sel sur– naturel le jour, voûte étoilée la nuit), la propriété ouverte il y a 10 mois a lancé son programme de résidences d’artistes avec le célèbre photographe et artiste bolivien Gastón Ugalde. Ses œuvres et installations, comme le lama coloré grandeur nature qui vous accueille sur la terrasse, emplissent l’hôtel et égaient une partie de l’étendue de blanc qui l’entoure. Ugalde anime même des classes de maître de photographie pour les clients. Que vous vous serviez d’un téléphone intelligent ou d’un appareil plus sérieux, n’oubliez pas de regarder vers le ciel de temps en temps. —Dominique Lamberton
Meilleures photos — Le photographe Max Milligan, qui animera en mai un atelier au Kachi Lodge, y va de ces conseils.
Ayez un trépied (même petit) « Pour photographier les étoiles qui brillent plus fort au Kachi (on voit aussi toute la Voie lactée), votre appareil doit rester immobile de 20 à 60 secondes. »
Maîtrisez votre appareil « Passez en mode manuel ; en mode automatique, l’appareil réagit selon sa volonté, pas la vôtre. »
Remplissez le cadre « Les photos partagées à moitié entre ciel et sel sont sans intérêt ; si le ciel est déchaîné, qu’il remplisse tout le cadre ou l’écran. Et faites des gros plans sur les cactus, les textures, les flamants, et tout ça. Osez. »
Une halte en prêt–à–camper
sur le Golfe de Californie
Des lagunes secrètes. Des plages désertes jonchées de coquillages. Une eau si limpide qu’on peut voir des étoiles de mer sur les fonds sablonneux dans l’ombre du kayak. Des soupers en plein air où la prise du jour (des balistes) est livrée sur la plage par deux pêcheurs fringants (les frères Pulpo, Mario, 85 ans, et Santiago, 92 ans) en petit bateau à moteur. Et le plus beau, peut–être : aucune réception, au cas où vous voudriez consulter votre téléphone. Voilà la routine qui prévaut sur l’île d’Espíritu Santo, en Basse–Californie du Sud, au Mexique. —Sydney Loney
Une voyage dans le temps
à Saskatoon
Pointes de flèche, outils tranchants, tessons de poterie et os de bison (dont certains plus vieux que les pyramides d’Égypte) ont été découverts au parc du patrimoine Wanuskewin, à Saskatoon. Ernie Walker, archéologue à l’Université de la Saskatchewan, a fondé le parc de 240 ha en 1992. (À l’emploi d’un ranch sur le site dans les années 1960, il trébuchait sur des éclats du passé.) « Il fallait préserver le parc : l’érosion faisait sortir des artéfacts des berges. »
Site de fouilles archéologiques le plus ancien du Canada, Wanuskewin est candidat au patrimoine mondial de l’Unesco. On y offre la visite guidée de fouilles actives, et un nouveau labo archéologique sera ouvert au public plus tard dans l’année. Pour Chris Standing, Dakota et chef des services aux visiteurs, le plus emballant est le retour de l’objet d’étude principal du site : le bison, pratiquement disparu des Prairies, réintroduit en janvier. « On renoue avec un animal qui a subvenu à nos besoins et à ceux de la terre pendant des millénaires », dit–il. Les bisons du passé sont tout aussi importants pour Walker, qui s’intéresse particulièrement à leurs troisièmes molaires. « L’émail révèle le régime alimentaire des bisons grâce à la géochimie isotopique, et la datation au carbone nous donne leur âge. » —Jenn Smith Nelson
Un archéologue répond — Ernie Walker sur la richesse de Wanuskewin.
Vous compare–t–on à Indiana Jones ? Oui, à mon grand dam, et c’est tout à fait farfelu.
Pourquoi aller à Wanuskewin ? Nul autre endroit n’offre côte à côte roues médicinales et précipices à bisons ; mes étudiants y trouvent un artéfact aux 15 minutes.
Quelle est la plus grande méprise au sujet des sites de fouilles ? Beaucoup de gens croient, à tort, qu’on cherche des dinosaures.
Une tournée culinaire
de la nouvelle Toscane
« Je préfèrerais de loin manger des pâtes et boire du vin plutôt que d’être une taille zéro. »
Sophia Loren
On l’appelle la nouvelle Toscane. Les amateurs de 007 familiers de la bande–annonce de Mourir peut attendre reconnaîtront ses paysages inondés de soleil aux couleurs saturées, et l’on a vu Meryl Streep et les Beckham profiter du spectaculaire littoral, des vertes oliveraies et des antiques cités qui abondent dans le talon de la botte italienne.
La région des Pouilles est une destination culturelle et gastronomique où la cuisine est une histoire en soi et où un simple repas devient un voyage dans le temps. Avec 60 millions d’oliviers, c’est aussi le paradis des mordus d’olives, qui découvriront pressoirs souterrains centenaires et moulins à huile modernes en activité au fil de visites guidées.
Surnommée « la ville blanche », Ostuni, foyer de maints oléiculteurs, est un dédale de rues qui débouchent souvent sur de grands crus et d’excellents plats. Comme de nombreux coins des Pouilles, Ostuni a été gouvernée, selon les époques, par les Romains, les Goths et les Normands. À ce passé, combinez de plus récents traits culturels espagnols, français et grecs, en plus de profondes racines italiennes. Ces influences se voient partout, depuis une tourelle et un jardin conçus par les Normands au XIIe siècle jusqu’à des plats locaux comme la tiella, une tourte aux accents espagnols de moules sur coquilles avec riz, oignons et pommes de terre.
Préparer un repas de plusieurs services aux ingrédients locaux est la meilleure façon de se plonger dans les saveurs d’ici. Un cours de cuisine dans une masseria (maison de ferme) médiévale permet aux touristes de faire des orecchiette (pâtes locales rondelettes dont le nom signifie « petites oreilles »), des aubergines alla parmigiana ou encore d'apprendre à fabriquer de la mozzarella et de la burrata fraîches. Savourez le tout en plein air, arrosé d’un vin du cru, sur fond de murs chaulés et d’oliviers.
Évidemment, un cours de cuisine ne suffit pas à couvrir toute la gamme de succulentes spécialités locales : les taralli pugliesi (anneaux croquants de pâte cuite au four), grignotines qu’on sert généralement avec du vin rouge ; les antipastis à tendance végétarienne, tels sformato (un riche flan au fromage et aux légumes), torta et marinades d’aubergines, de poivrons et de courgettes du coin ; et le pane di Altamura, un pain de blé moulu localement aux spécifications bien précises.
Peu importe ce qui attire les visiteurs aux Pouilles (revivre un moment digne d'une scène épique de James Bond ou simplement profiter du farniente et du parfum salin de la Méditerranée), ils seront sous le charme d’une des plus exceptionnelles régions d’Italie. —Malcolm Gilderdale
« Le problème avec la nourriture italienne, c’est que cinq ou six jours plus tard on a de nouveau faim. »
George Miller
Un safari urbain
dans New York
On raconte qu’il y a 50 ans, le gouvernement argentin aurait expédié à New York un important lot de conures veuves sauvages destiné aux animaleries, pour à la fois tâcher d’en réguler les populations et d’en tirer profit. Les oiseaux s’étant échappés, la légende veut qu’une volée tout droit sortie de JFK soit allée se construire d’imposants nids collectifs partout en ville, sur les corniches, les arbres et les poteaux des services publics. Aujourd’hui, le Wild Brooklyn Parrot Safari offre des visites guidées éducatives d’environ une heure à pied qui permettent aux ornithophiles d’observer ces petits psittacidés vert clair dans leur habitat (pas trop) naturel.
Les conures veuves se sont adaptées à la ville, troquant les graines pour la nourriture de rue et utilisant leurs pattes agiles pour construire leurs logis (c’est le seul psittacidé à se faire un nid). Plus de 200 nids ont été repérés dans Brooklyn, notamment au cimetière de Green–Wood et à Brooklyn College, ainsi que dans Queens, le Bronx et même Manhattan. Le Wild Brooklyn Parrot Safari est l’une des 1000 nouvelles expériences de tourisme animalier local et responsable d’Airbnb. —Jenn Smith Nelson
Un périple transformatif
en Inde
À l’écart des circuits touristiques traditionnels, une promenade dans les rues de New Delhi est une expédition en soi. Il y a cette chaleur étouffante, les passants qui circulent pêle–mêle, le vacarme étourdissant des motos, des tuk–tuks et des klaxons. Des odeurs d’épices, d’encens, de poussière et d’égouts qui s’entrechoquent.
Guidant la visite, Davrij entraîne le petit groupe de voyageurs loin des grandes artères. Le garçon de 19 ans connaît bien l’enclave animée de Paharganj, où il a grandi dans la rue, et se promène aisément dans ce bazar achalandé en racontant comment il s’est joint au Salaam Baalak Trust, un organisme à but non lucratif qui propose des visites urbaines guidées par d’anciens jeunes de la rue.
Ce projet fait partie de ceux qu’appuie Planeterra, un OBNL qui vient en aide aux enfants, créé en 2003 par Bruce Poon Tip, pionnier du tourisme responsable. (Il y a 30 ans, celui–ci lançait G Adventures, une entreprise récréotouristique qui offre environ 750 voyages immersifs responsables.) « Le voyage peut être un catalyseur pour le bien commun lorsqu’il s’imprègne des collectivités locales, au lieu d’en faire abstraction », et ça, l’entrepreneur Canadien en est convaincu.
« Le Salaam Baalak Trust montre aux touristes un visage différent de New Delhi, poursuit–il, un visage impossible à découvrir autrement qu’à travers le regard des habitants et l’écoute de leurs récits. »
C’est au resto Kitchen With a Cause, créé grâce au soutien du Salaam Balaak Trust, que prend fin l’incursion urbaine du jour. Dans la salle à manger, des plats fumants de dhal, de paneer en sauce, de poulet tandoori, de cari et de pain naan recouvrent une table. Une jeune fille circule pour offrir des boissons. Comme Davrij, elle aussi a déjà connu la rue.
En orchestrant des voyages qui proposent autant des attractions touristiques que des immersions au cœur des collectivités, G Adventures offre une expérience qui répond simultanément aux deux besoins : l’entreprise estime que chaque dollar dépensé localement par ses voyageurs crée un stimulus économique de 8 $.
« Je doute que les touristes saisissent véritablement l’impact de leurs choix, confie Poon Tip. Bien souvent, leurs décisions sont déterminées par les coûts ou les installations et ne tiennent pas compte de la destination et de la population locale. » Le Programme des Nations unies pour l’environnement soulignait en 2013 que, pour chaque tranche de 100 $ dépensée dans un pays en voie de développement, seuls 5 $ y restaient.)
« Le voyage peut être un catalyseur pour le bien commun. »
Poon Tip et son équipe ont mis trois ans à développer une unité de mesure, le ripple score, qui indique quel pourcentage des dépenses locales d’un voyage G Adventures reste à même l’économie locale. Sur 640 voyages mesurés des 750 offerts, en moyenne 93 % de l’argent dépensé sur place va dans les caisses d’entreprises locales.
Bien que le Taj Mahal soit un incontournable du circuit proposé par G Adventures, la visite du monument se termine par un arrêt au Sheroes’ Hangout, un café débordant de vie qui sert une cuisine végé du nord de l’Inde et que gèrent des survivantes d’attaques à l’acide. « Ce que les touristes veulent, c’est admirer les monuments célèbres, tandis que nous voulons les faire sortir des sentiers battus et leur faire voir ce qu’ils ne verraient pas autrement, comme le Sheroes’ », dit Poon Tip. La fréquentation de ce café par les touristes sort ces femmes de l’isolement et leur permet de subvenir à leurs besoins, et les visiteurs, l’estomac plein, en ressortent grandis.
« La transformation est si réelle lorsque nos voyageurs constatent de visu l’impact que leurs choix ont eu sur d’autres humains », conclut Poon Tip. —Catherine Girouard
Un trek secret
dans la vallée sacrée, au Pérou
Comme toute beauté photogénique, Machu Picchu sait quel est son meilleur profil, qu’il présente d’emblée aux visiteurs. Après la billetterie, empruntez sur 100 m un sentier ombragé jusqu’à un plateau dégagé, et paf : murs de vieilles pierres et terrasses vertes et raides au creux de montagnes découpées, dignes d’une carte postale, ou d’un fil Instagram.
Ce que ce flux ne montre pas, c’est la file léthargique de touristes (1,5 million par année) qui attendent de se prendre en photo dans le seul coin qui occulte le gros de la foule. Je fais la queue, résignée, avançant du même pas traînant que j’adopte chez moi pour monter dans un tram bondé ou payer l’épicerie. Cinq cents ans après son abandon par les Incas, on a refait de Machu Picchu une cité.
Mais ailleurs dans la vallée sacrée des Incas (le sinueux bassin verdoyant au sud–est de Machu Picchu), il y a encore profusion de ruines, d’à–pics vertigineux et de vues ahurissantes. Depuis quatre ans, le groupe d’aventures sud–américain Explora contribue à détourner les voyageurs des sites surpeuplés vers ces paysages plus reculés ; sa palette initiale de 25 randonnées pédestres et cyclistes a été élaborée par le guide Vider Chavez, un jeune vététiste qui connaissait tous les meilleurs chemins de traverse. L’offre est à présent d’environ 40 forfaits, et d’autres sont prévus à plus grande altitude. « J’aime la puna », me dit Chavez, faisant référence au biome culminant du Pérou, au–dessus de la limite forestière. « J’aime son silence. »
Bref, après Machu Picchu, c’est là que je vais : dans l’air raréfié des Andes, pour une randonnée de 10 km au fil de cinq lacs à près de 4500 m d’altitude. Pas grand–chose ne pousse à cette hauteur, à part des pommes de terre (il y en a au moins 5000 variétés), dont les rangs étroits donnent aux champs couleur d’ombre l’air d’avoir été ratissés par des ongles. Après le deuxième lac cristallin, un fermier quechua creuse des sillons avec une chakitaqlla, sorte de bêche en bois avec appui–pied qui remonte à 800 ans. Une radio plantée dans la stipe graminée joue en sourdine. Au–delà du fermier, là où le sol rocailleux s’élance à l’assaut du ciel clair, des alpagas flânent par dizaines, agitant leurs oreilles. Rien d’autre ne bouge.
À 1 km, j’aperçois deux pyramides de larges pierres qui semblent m’arriver aux hanches, pratiques pour s’orienter par temps brumeux, explique mon guide, mais aussi pour y déposer des offrandes. Je grimpe une crête effilée jusqu’aux monticules, d’où je découvre le mont Sahuasiray, parfaitement encadré, ses pics anthracite coiffés de neige aveuglante. Des collines vert et ocre ondulent en contrebas, traversées par un sentier d’alpagas. C’est de loin le panorama le plus étendu que j’aie vu de toute ma vie. Je me pince et prends l’inspiration la plus profonde possible à cette altitude, puis je me fonds dans le décor. —Danielle Groen