La dernière collection de Karl Lagerfeld aux chutes Niagara
Landon Nordeman improvise une séance photo à Niagara Falls, sur fond de touristes se régalant de ses merveilles kitsch. En collaboration avec le poète canadien Kaie Kellough, le photographe a créé un reportage mode où s’entremêlent documentaire et conte de fées.
splendeur kitsch
i.
transi dans son midi le soleil
s’abat sur la mousse tranquille des chutes niagara la frontière
sous–marine, invisible, ignorée des saumons, des truites, des dorés
des prismes zèbrent le ciel, des arcs ultraviolets s’étirent d’un
empire à l’autre
les néons du marriot clignotent
un nuage de touristes errants le ciel, miroir azur
détourne le regard arrête–toi
cligne des yeux un filtre instagram tel une bruine
qui voile, dévoile cette splendeur
ii.
la pluie noie l’objectif l’image est floue
l’image c’est ce qui est dedans c’est ce qui est
à l’extérieur du cadre, exclus c’est l’image
des mots, lesquels, c’est ce qui ne dit rien ? elle est sans mots n’est–ce pas
une chanson qui frôle le quotidien la pluie noie la mise au point
à l’extérieur du cadre se trouve
quoi ?
ce que les touristes oublient dans leur confort, c’est ce qu’ils portent à loisir, c’est
un saumon un imper en plastique rose vacanciers à l’abri
des confettis qui jaillissent du champagne de l’écume du
serveur né ici
des femmes de chambre, des préposés
à l’accueil dont le labeur marie cette ville de motels
à l’imaginaire national
iii.
le poème, traître comme l’eau, imbibe la page
sa pensée invisible s’infiltre dans l’infrastructure de l’image
porteur d’une question: si tout est à vendre, est expliqué
est la surface réflectrice qu’on fixe, dans l’espoir, peut–être, de voir
une estimation idéale de nous–mêmes cachée dans
les rideaux délicats qui cascadent jusqu’au tapis noisette du motel,
à côté d’une interdiction
de fumer sur la porte bleue, la familiale
aux panneaux de bois stationnée en épi nostalgique sommes–nous aussi
en train de rouiller au soleil
oxydés par le passage du —
iv.
dans la lentille ondulée d’une piscine le glamour sombre, se tord
dans l’eau et la lumière et les bulles
déambulent sous la surface et enfin jusqu’à elle pour éclater, respirer
une cabine de téléphone béante son combiné pendu
vide de sens comme une bouche noyée et molle
qui aspire l’eau à deux pas d’une rivière d’asphalte
des moteurs qui vibrent dans le vide
v.
un doigt pointé vers la tour skylon
la tour tisse les nuages de son intention, de son ambition, la tour
tisse le regard le point brillant perce le rouge et le blanc
des pacotilles de lunettes soleil des touristes
fabriquées par quelqu’un, achetées par quelqu’un, vendues par quelque
patriote aveuglé? qui célèbre l’emprise de la nation sur la nature
dont
l’économie surveille ces rochers sous une douche d’aérosol — l’attraction tranchante
en dessous au–delà de la frontière le prix d’entrée de l’eau payé
par sa peau transparente
vi.
à la frontière entre être
ici et être l’eau. plaisir et dollar. entre être
mouillé et être emballé. plastique et libre, entre
être paysage et être une seule larme —
un ongle rouge pointe vers la blondeur
du midi qui se répand en prismes de cristal champagne effervescent
une piqûre
de moustique, une bruine
vii.
si tu pouvais tirer sur la lumière du ciel, t’enduire la peau de son reflet
prendre une bouchée mûre avant sa dissolution avant son départ
un nuage qui te coule entre les doigts, qui sèche comme
une feuille orange brûlé, pliée dans ta paume aplatis–la entre les pages
d’un album d’images
rempli de la splendeur kitsch de niagara la feuille prise entre une photo
des chutes à vol d’oiseau et d’un faux elvis tu secoues la feuille
à l’intersection du poème
et de la marchandise la vision d’un glamour noyé qui se laisse deviner derrière
une fenêtre et toi,
viii.
le regard perdu dans le reflet, tu contemples la ligne entre nationalisme
et commerce chanson pervertie où le glamour s’érode
contre nulle part la frontière s’agite entre
onguiaahra et les touristes enveloppés de plastique rose
l’héritage porte en lui la conquête l’histoire dissoute
ix.
volume
le passé gronde dans le combiné pendu d’une cabine de bell près d’une rivière d’asphalte dans une langue qui anticipe la nôtre
personne
n’entre dans la cabine ne porte le combiné comme un coquillage à son oreille
n’écoute, hypnotisé par la grammaire ancestrale n’ajoute sa voix à la rumeur
ne raccroche
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