Un voyage visuel au bout du monde
Au Chili, le parc national Torres del Paine, symbole de la beauté patagonne, est aussi une réserve de biosphère de l’Unesco de 2273 km2 qui abrite lacs, glaciers, montagnes et forêts. En 2013, le National Geographic l’a classé en cinquième position des plus beaux endroits sur terre.
Couvrant toute l’extrémité méridionale de l’Amérique du Sud, entre massifs vertigineux et côtes nues, la Patagonie sauvage fascine depuis longtemps le photographe Mustafah Abdulaziz. Il s’est lancé sur les routes du sud du continent, créant un journal photo de son voyage de 4800 km au bout du monde, de Buenos Aires à la Terre de Feu.
enRoute Qu’est-ce qui vous a poussé à accepter cette assignation ?
Mustafah Abdulaziz Je viens du monde du documentaire, alors je suis habitué à couvrir des enjeux sociaux et environnementaux. Je voulais photographier quelque chose de différent cette fois-ci, m’échapper de Berlin, où j’habite. J’ai pensé au road trip, car il permet de voir le monde défiler en profondeur. J’aime voyager avec d’autres et partager ces tranches de vie, alors j’ai demandé à mon ami Darren McDonald (un photographe de mode accompli de New York) de m’accompagner. Ce fut une expérience incroyable.
ER Comment avez-vous abordé ce photoreportage ?
MA En capturant des moments alors qu’ils se déroulaient sous mes yeux. Je voulais rassembler des expériences, être sensible aux choses qui se présentaient à moi, pour ensuite les traduire en un langage visuel. C’était tellement libérateur : j’allais d’un lieu à l’autre et prenait des photos uniquement dans le but d’en apprécier l’expérience. J’ai souhaité transposer la magie que j’ai vue en images. Je cherchais des symboles et des images fortes partout ; je photographiais des morceaux choisis, des fragments de voyage. Ces moments sont les plus remarquables, les plus touchants selon moi.
Sur la route 43, juste au sud de Comodoro Rivadavia, en Argentine, on trouve de vastes plaines de steppe aride. « Une partie du charme de la Patagonie repose sur ses paysages changeants, entre plaines au ciel barbouillé de nuages et montagnes multicolores. Avec un téléobjectif comprimant l’image, j’ai pu saisir tous les motifs de ces affleurements rocheux colorés dans une même photo. »
ER Quels conseils donneriez-vous à ceux et celles qui voyagent en Patagonie ?
MA Laissez-vous imprégner et transporter par le voyage. Chaque fois que vous visitez un nouvel endroit, que vous découvrez une chose nouvelle, vous retrouvez votre curiosité d’enfant. Parfois, ce n’est qu’un arbre, un paysage ou une personne à cheval. Donnez-vous le temps de vraiment regarder, d’apprécier. L’expérience sera peut-être intimidante, mais elle vous donnera une force nouvelle. Offrez-vous aussi de la flexibilité dans votre itinéraire. Le moment présent est particulièrement célébré en Patagonie, alors permettez-vous de le vivre pleinement.
ER Qu’est-ce qui rend la Patagonie si unique ?
MA En parcourant la Patagonie, vous remettez constamment en question votre place dans l’univers, la pertinence de vos soucis et du stress quotidiens. Tout est si reculé, étendu ; des millions d’années d’histoire s’inscrivent dans ces terres toujours changeantes. Vous prenez conscience de votre petitesse face à ce décor qui résiste depuis toujours.
« Je voulais photographier un objet qui rendrait bien l’effet du vent cherchant à faire ployer les choses, et j’ai été particulièrement attiré par cet arbre unique, aux lignes nettes et équilibrées. »