Scènes nordiques

Le photographe Pat Kane révèle les habitants et les lieux des Territoires du Nord–Ouest.

enRoute Qu’est–ce qui vous a amené à la photo et comment avez–vous su que vous vouliez en faire une carrière ?

Pat Kane J’ai grandi dans une famille d’artistes. Ma mère était peintre et je la regardais peindre des scènes d’après des photos d’enfance prises dans sa réserve, au Québec. Je me suis toujours vu comme un journaliste et c’est à cela que je me destinais, mais l’écriture ne me satisfaisait pas. J’aimais raconter des histoires et la photographie documentaire m’inspirait. Après mes études de premier cycle, je me suis inscrit au Humber College en journalisme et photographie. J’ai appris à faire de la photo et suis tombé sous le charme de ses possibilités narratives.

ER Quelle histoire voulez–vous raconter avec vos photos ?

PK Je veux recenser la vie quotidienne des habitants du nord. La plupart des photographes qui y viennent captent les paysages, la faune ou les aurores boréales, qui sont magnifiques et qui méritent d’être découverts, mais ce sont les habitants que je veux montrer, et les liens entre eux et avec la terre. Il est important de collaborer avec les groupes autochtones ici pour les aider à raconter et à valoriser leurs récits. On connaît peu les Territoires du Nord–Ouest, dont l’identité n’est pas aussi forte que celles du Yukon ou du Nunavut. Je veux mettre la culture des Territoires du Nord–Ouest à l’avant–plan et créer un dialogue qui révélera sa force et sa beauté.

ER Vous abordez dans vos œuvres diverses questions autochtones, dont l’autonomisation. Pourquoi ces causes vous tiennent–elles à cœur ?

PK Au cours des deux dernières années, j’ai collaboré avec de nombreux groupes écologistes liés aux Premières nations afin de montrer la vie dans les régions les plus éloignées des Territoires du Nord–Ouest. Les gens de l’extérieur de Yellowknife ont sérieusement à cœur la protection de la terre et leur rôle de gardien de l’environnement. Pour les aînés et la communauté des dirigeants, il ne s’agit pas seulement de protéger notre territoire, mais également d’enrichir et de préserver notre culture et nos traditions. Je vois des gens qui sont si fiers et si heureux d’habiter en ces terres. C’est une chose dont les gens parlent peu quand ils visitent le Grand Nord.

ER Qu'est–ce qui vous a le plus étonné à propos de la vie dans le Nord et qu'est–ce qui vous y plaît le plus ?

PK C’est une communauté très forte. J’ai beaucoup de chance de pouvoir faire partie de cette jeune ville où les gens sont créatifs. J’adore rencontrer des gens et travailler sur leurs récits, mais j’apprécie également la diversité du Nord et de Yellowknife.

ER Si votre meilleur ami vous rendait visite à Yellowknife, que lui suggéreriez–vous de faire et de voir ?

PK On propose une sorte d’itinéraire à ceux qui viennent à Yellowknife. Il faut faire du two–step au Gold Range Bistro, un bar qui existe depuis toujours. Et forcément, un vol en hydravion !

ER Quelle est la meilleure période de l'année pour visiter Yellowknife ou les Territoires du Nord–Ouest ? Pourquoi ?

PK En plein été, car nous avons 20 heures de soleil au solstice du 21 juin. Les gens sortent jusqu’à une heure du matin et la lumière est magnifique. L’autre période propice aux visites, c’est en mars : l’hiver bat son plein, mais il y a beaucoup de festivals. Yellowknife reprend vie après les sombres mois hivernaux. Les gens se rendent dans la baie de Yellowknife et ils dansent, ils jouent au hockey et ils skient. Et les aurores boréales sont magnifiques à cette période de l’année.

ER À part votre appareil photo, quel est votre inséparable en voyage ?

PK En vacances, c’est ma femme ! On voyage toujours ensemble. Elle m’incite beaucoup à voyager. Avant notre rencontre, je n’étais jamais allé en Europe ni au Mexique. Je n’avais parcouru que le Canada, que j’adore et qui est magnifique, et je recommande à tous d’en faire autant, mais elle m’a entraîné dans des lieux vraiment passionnants.

ER Quelques–uns de vos comptes Instagram préférés ?

PK Peter Mather (@matherpeter) est un photographe du Yukon. Il fait beaucoup de travail de conservation et réalise de superbes photos fauniques. Amanda Annand (@amaradah) est une docu–photographe basée à Yellowknife, et l’une des meilleures photographes émergentes selon le Flash Forward de la Fondation Magenta de l’an dernier. Et @weronikamurray vit à Inuvik et produit des œuvres dans divers domaines : documentaire, portrait et photojournalisme.

21 juin 2019
Enfants nageant dans le Grand lac des Esclaves, TN-O.
Malgré la croyance populaire, le Nord n’est pas que glace et neige. L’été, le mercure peut dépasser les 30 degrés Celsius et les périodes d’ensoleillement peuvent atteindre les 20 heures. Sur cette photo, familles et enfants se rafraîchissent dans les eaux du grand lac des Esclaves, à Whitebeach Point, dans les Territoires du Nord–Ouest, une petite bande de terre isolée d’une grande importance pour la nation Tlicho Ndek’aowo.
Le ciel nocturne est nuancé de vert, de bleu et de violet grâce aux aurores boréales.
Une aurore boréale colore le ciel au–dessus des bateaux–maisons uniques et colorés de Yellowknife. Depuis un an, je travaille à un projet sur les gens qui habitent cabanes et autres maisons précaires dans la ville et ses alentours. Plusieurs demeures ont été bâties par des prospecteurs dans les années 1940 et sont toujours habitées aujourd’hui. Les premiers bateaux–maisons sont apparus dans les années 1980.
Le ciel au-dessus d'un lac est rose et violet depuis un coucher de soleil.
Quand on nous demande pourquoi nous vivons dans le Nord, nous évoquons la gentillesse de ses habitants de longue date, les occasions de s’y réinventer, et la lumière et les couleurs qu’on y voit alors que le reste du continent est dans le noir.