Le rituel des courses au supermarché Migros dans le village suisse de ma grand–mère

D’aussi loin que je me souvienne, je rends visite à ma grand–mère à Unterägeri, à près d’une heure de Zurich. Mes séjours dans ce sage village comportent inévitablement des week–ends parfaitement sans histoires passés à jouer au rami sur la terrasse, émaillés du plaisir des visites rituelles au supermarché local.

Pour moi, la connaissance intime d’une ville dépend entièrement d’une épicerie. À Venise, j’ai fendu des hordes de touristes au célèbre pont du Rialto pour parvenir à une Coop, et, bien que Tokyo soit constellé d’étoiles au Michelin, mon expérience culinaire incontournable demeure la section des onigiris réfrigérés du 7–Eleven. Pourtant, nul supermarché ne frôle autant la perfection que le Migros du village de ma grand–mère, où magasiner est la plus enrichissante des routines de voyage.

Migros a été fondé en 1925 avec un parc de Ford T servant de camions–magasins dans la région de Zurich. C’est aujourd’hui le plus grand détaillant de Suisse, avec plus de 700 adresses.

J’emprunte le trajet familier au bord du lac jusqu’à la succursale locale et en parcours les allées, ivre d’helvétude. Les emballages sont agréablement minimalistes, les produits laitiers, ornés de beautés alpines vêtues de dirndl, et le choix de chocolat, hallucinant.

25 septembre 2019
Illustration d'une main recherchant un signe plus en forme d'achats en arrière sur un fond rouge

La plupart des denrées sont produites par le détaillant, ce qui les rend difficiles à trouver hors de Suisse. La dame à la caisse hausse les sourcils à la vue de mon butin. J’ai des sachets de potage Célestine (bouillon de bœuf léger avec lanières de crêpes salées) et des emballages de Mostbröckli (bœuf séché, entre prosciutto et charqui). J’achète des croustilles dans chaque pays où je vais, mais nulles ne valent les Farm Chips, la marque maison de Migros : épaisses, croustillantes mais pas trop, saupoudrées de romarin.

Cette fois, je ne fais que passer. Ma grand–mère attend à la maison, et c’est d’elle que je tiens mon impatience. Je passe lui acheter un bouquet chez le fleuriste en magasin et reprends le chemin du lac pour une autre partie de rami. Quand, chez moi à Londres, j’attaque une tablette de chocolat au lait (au vrai lait alpin), j’ai toujours l’impression de me rapprocher d’elle, et de mon expérience suisse. Pour l’heure, je suis sûre d’avoir oublié quelque chose (des röstis emballés sous vide, peut–être ?), mais je sais que j’aurai une autre occasion avant de prendre l’avion : le Migros de l’aéroport de Zurich est gigantesque.