Impossible de savoir si les vagues dansent au roulement du tambour ou si ce sont les mains du percussionniste qui suivent le rythme de la nature. La question ne se pose peut–être pas, puisque selon les enseignements des Premières Nations, tout ne fait qu’un. Les vagues déferlent sur les rochers ; leur souffle projette une constellation de gouttelettes portées jusqu’aux arbres par le vent, libérant leurs parfums de sel, de sable et de cèdre vers le ciel. La musique du tambour s’arrête, mais l’océan Pacifique garde la cadence de la nature.
Trevor Cootes, conseiller auprès du gouvernement autonome Huu–ay–aht, range son tambour. Tant et aussi longtemps que l’histoire de son peuple s’est exprimée par le chant et la danse, cette anse abritée se nommait Kiix̣in (prononcé “kee–hin”). « C’était l’un de nos principaux villages, » dit Cootes à propos de ce site qui domine les îles de l’archipel Broken Group, sur la côte ouest de l’île de Vancouver. Il arpente aujourd’hui les sentiers récemment délimités par des coquilles d’huîtres décolorées par le soleil qui orientent les visiteurs dans ce qui est devenu un site historique national. « Pendant la saison de la pêche à la baleine, nos ancêtres vivaient ici, dans des maisons longues », ajoute–t–il.
Kiix̣in est un site ancien. Les archéologues estiment que la présence humaine ici date d’au moins 5500 ans. Avec le temps, les habitants du village se sont peu à peu retranchés dans la forêt. Les pilotis en décomposition des anciennes maisons longues sont là pour mémoire et servent désormais à fertiliser des arbrisseaux qui pointent déjà fièrement vers le ciel. De nos jours, les lieux sont en voie de devenir le symbole de la revitalisation de toute une communauté.