Faire du voyage virtuel une réalité (avec Félix et Paul Studios)

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La réalité virtuelle (RV) peut-elle nous donner le sentiment réel de voyager dans des contrées lointaines (ou même dans des mondes imaginaires) sans quitter la maison ? Les pionniers de la RV Félix Lajeunesse et Paul Raphaël, cofondateurs de Felix & Paul Studios, à Montréal, répondent par l’affirmative. Mais pour y parvenir, les créateurs d’histoires faisant appel à la RV doivent continuer à perfectionner leur art et à trouver de nouvelles façons d’aider les gens à se perdre dans l’instant.

Félix Lajeunesse Je ne pense pas que tous les sujets fonctionnent en RV. Ce n’est pas uniquement la façon de raconter une histoire. Il s’agit de savoir, en parallèle, raconter une histoire tout en intégrant le spectateur dans la narration. Si on a une bonne histoire, mais qu’on ne trouve pas un moyen de vraiment intégrer le public dans l’expérience, c’est que ladite histoire n’est pas faite pour la RV.

Paul Raphaël Un projet peut se concrétiser de bien des manières. Je me questionne souvent sur le contexte idéal pour les expériences de RV. Qu’est-ce qui optimiserait vraiment, de façon formelle, la présence du public ? Dans le cas de Miyubi [avec Jeff Goldblum], nous avons commencé par mettre le spectateur dans le corps et l’esprit d’un petit robot-jouet japonais des années 1980. C’était une façon de mettre l’accent sur le spectateur, tout en justifiant sa capacité limitée à interagir réellement avec les personnages, qui s’adressent directement à lui.

Un homme élève des troupeaux de yak pendant que deux personnes sont assises sur le terrain en Mongolie
Un cowboy et son troupeau de yaks dans les steppes mongoles-mandchoues.     Photo : NOMADS
Une famille d'éleveurs se rassemble pour le thé dans une cabane circulaire
Un *ger* mongol.     Photo : NOMADS

FJ C’est notre métier de cinéastes immersifs de raconter de bonnes histoires, mais aussi de trouver un moyen de créer un sentiment de présence pour le public. Si je pense à Traveling While Black [documentaire en RV], par exemple, l’intention initiale était d’explorer comment la réalité du voyage en Amérique a évolué pour les Afro-Américains au cours des dernières décennies, depuis l’époque du Green Book, un guide créé pour que les Afro-Américains puissent voyager en toute sécurité et trouver des endroits sûrs dans tout le pays.

Au début, nous ne savions pas nécessairement comment faire sur le plan de la présence. Mais en travaillant avec le créateur de la vidéo, Roger Ross Williams, nous avons commencé à réfléchir à la possibilité de trouver un lieu qui aurait figuré à l’origine dans le Green Book et qui existerait encore aujourd’hui. Nous avons pensé immerger le spectateur dans un lieu et utiliser ce lieu comme machine à voyager dans le temps.

Nous avons commencé à transformer ce lieu pour le ramener à son aspect d’il y a 50 ans, à traduire le passé en présent, à organiser des conversations entre des habitués de ce lieu et à faire en sorte que le spectateur s’assoie à la table de cette communauté à différentes époques pour entendre ces conversations. Et tout à coup, tout a pris son sens. Si nous n’avions pas trouvé cette idée centrale, je ne pense pas que le projet aurait été bon pour la RV.

Un groupe de Kenyans teste un appareil de réalité virtuelle à Amboseli
Le Parc national d’Amboseli, au Kenya.     Photo : Felix & Paul Studios

PR À l’avenir, la différence entre la réalité et le virtuel va devenir de plus en plus minime si tous vos sens perçoivent le virtuel comme étant aussi réel que la réalité. À un moment donné, ça devient une ruse de l’esprit. Du genre « D’accord, je mets de côté mon incrédulité, comme quand je regarde un film et que je suis transporté à Rome ».

C’est en fait encore plus intéressant, je trouve, de penser non pas à une Rome virtuelle, mais à un lieu virtuel qui ne pourrait pas exister dans le monde réel. Rome est faite pour les êtres humains vivant sur Terre avec la physique de ce monde, alors qu’une expérience de RV pourrait réinventer toutes ces choses.

Il existe de très nombreuses façons d’imaginer un format qui optimise la présence du public, et d’explorer les idées nouvelles qui en découlent. Parfois, quelqu’un nous surprend en proposant une idée et nous disons : « C’est bon. C’est fait pour la RV. »