L’article « Fameux fait main » a été publié à l’origine dans le numéro de décembre 2016 d’Air Canada enRoute.
« Tout débute par le thé », lance Toshio Ohi en ouvrant les cloisons coulissantes de son salon de thé. À l’instant où le céramiste de 11e génération m’invite à m’asseoir à une table basse, une femme sort d’un coin de sa maison de samouraï bicentenaire et dépose un plateau rempli de matcha et de confiseries aux noix, le thé glaçant de vert l’intérieur des bols noirs. « Kanazawa s’est bâtie autour d’arts raffinés par les samouraïs », déclare Ohi à propos de la capitale de la préfecture d’Ishikawa, ville basse de 450 000 habitants qui sépare de vertes montagnes d’un large ruban de plages de sable sur la mer du Japon. « Et la culture des samouraïs est indissociable de la cérémonie du thé, car le thé fait appel à tous nos sens. » Je prends un des bols créés par le maître et le fais pivoter d’un quart de tour, suivant la coutume, avant de le porter à mes lèvres. Tenir ce bol, c’est comme lire du bout des doigts la surface texturée d’un haïku composé en l’honneur des collines embrumées de la région. J’essaie de fixer mon attention sur l’arôme de roseaux du thé et le lacis de minuscules bulles à sa surface. J’ai peine à ne pas regarder les poutres de bois du plafond qui courent jusqu’au salon de thé contigu, couvert de tatamis et doté d’un foyer central. J’ai aussi de la difficulté à ne pas balayer du regard le jardin où un pin rouge de 500 ans se dresse tel un ninja. Enfin, j’arrive à me concentrer et à boire ma troisième et dernière gorgée. Ohi hoche la tête. « Il s’agit de faire les choses à fond, avec intention. »
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