Je ne sais plus dans quel bar près de l’élégante gare centrale de Rotterdam je suis entré à mon arrivée, mais le genièvre que j’y ai bu était sans doute un Bols, exemple de ce que plus tard j’apprendrais être un jonge jenever, ou jeune genièvre : un alcool blanc avec une pointe de doux pétrole au nez. Je pensais qu’il serait âpre, à l’instar d’une rakia serbe ou de certains brennivíns islandais maison, mais il y avait plutôt un petit peu de malt et une trace de sucré, un goût à peine végétal. Et même si l’apparence et l’odeur étaient celles du gin, ça tenait un peu d’un whisky, d’un bon, de ceux qu’on garde un moment en bouche avant de les déguster.
Laphroaig m’a initié aux plaisirs des purs malts, et je suis venu au gin par la voie du Gibson (gin, vermouth sec, oignon grelot mariné). Au fil des ans, mon goût pour ces deux eaux–de–vie n’a fait que croître, et là je trouvais une boisson qui semblait réunir leurs meilleurs attributs. Je remarquai que les résidents calaient leur genièvre, tel un expresso des Pays–Bas. Moi, je sirotais et savourais le mien. Avant même de terminer mon verre et de rentrer à l’hôtel, j’avais décidé que mon séjour allait désormais me servir à en savoir le plus possible sur cet ancêtre néerlandais du gin que bien peu de mixologues connaissent en Amérique du Nord.